La vitamine D: un intérêt, grandissant pourquoi?
Les scientifiques ont démontré que le phytoplancton de l'espèce Emiliani huxleii, qui est resté inchangé dans l'océan Atlantique depuis 750 millions d'années, produisait quand il est exposé au soleil de la vitamine D, ce qui fait d'elle l'hormone la plus ancienne.
A la fois vitamine et pro hormone, elle est vitale pour la santé. Au IXème siècle déjà, il est établi que le rayonnement ultraviolet induisait un facteur anti rachitique dans la nourriture et chez l'animal.
A la fin des années 20, il est clairement établi que le rachitisme peut être prévenu et guéri par exposition directe au soleil.
Biosynthèse de la vitamine D3.
Notre peau est dotée d'un précurseur le''7-déhydrocholestérol'' qui est une molécule adipeuse, dérivée du cholestérol. Elle est isomérisée spontanément en cholécalciférol (pré-vitamine D) et c'est ce que nous dosons pour évaluer le statut de notre sang en vitamine D.
Le cholécalciférol qui est transporté par le sang vers le foie est transformé en ''25-hydroxyvitamine'' appelée aussi calcidiol. Cette forme de réserve de la vitamine D3 est véhiculée vers le rein et sous l'effet d'une enzyme (1 alpha- hydroxylase) elle se transforme en calcitriol (1,2-dihydroxyvitamine).
Une fois synthétisée, la vitamine D3 active diffuse dans l'organisme et agit sur ses organes cibles tels que l'intestin, l'os, les reins et les parathyroïdes.
La vitamine D appelée aussi ‘’calciférol’’ est produite par l'organisme à hauteur de 90% de ses besoins et l'alimentation assure les 10% restants.
La source alimentaire peut être végétale (champignons et avocat) sous forme d'ergocalciférol (vitamine D3), ou animale (saumon, hareng et maquereau) sous forme de cholécalciférol (vitamine D3).
Il faudrait cependant manger 100 à 150 grammes de saumon et 1 kg d'avocat pour couvrir les besoins quotidiens!
Pour pouvoir en synthétiser de façon effective, une large partie du corps devrait être exposée au soleil sans crème écran (un indice de protection à 8 bloquerait 98% de la production de vitamine D).
Une exposition de 15 à 30 minutes par jour permet la synthèse de 10-15000 UI. Il n'y a jamais d'intoxication à la vitamine D naturelle.
Un statut adéquat en vitamine D est défini par un niveau circulant optimal qui devrait être compris entre 20-50 ng/ml (75-125 nmol/L).
Quels sont ces rôles vitaux de la vitamine D?
Plus de 200 os forment et soutiennent notre corps. Le plus petit (3mm) se trouve au niveau de l'oreille, le plus gros (46cm) dans la cuisse.
Nos os sont principalement des sels minéraux, notamment du calcium. Le squelette en contient au moins 1 kilogramme.
La vitamine D assure la minéralisation des os par une teneur en calcium de l'ordre de 98%. Son déficit entrainerait de l'ostéoporose, de l'ostéomalacie (ou les deux), prédisposant à des fractures et à une vie au quotidien néanmoins contraignante.
A côté de son rôle bien établi dans la régulation de l'homéostasie phosphocalcique, la minéralisation des os et des dents, l'absorption intestinale du calcium alimentaire, la vitamine D assure le maintien de l'intégrité intestinale par son action sur les protéines constituants les jonctions intercellulaires intestinales.
Elle contribue ainsi à prévenir ou améliorer la perméabilité intestinale responsable entre autres du côlon irritable.
Elle agit sur le système immunitaire inné contre les agents infectieux et mobilise les macrophages (grandes cellules des globules blancs), qui sont les ''soldats" de première ligne du système immunitaire.
Elle stimule l'immunité adaptative et augmente le nombre de lymphocytes (Th2) conduisant ainsi à un effet anti-inflammatoire.
Elle augmente l'expression d'un peptide anti-microbien ''human cathelicidin antimicrobial peptide'' (hCAP-18) qui a un impact spécifique dans la lutte contre les pathogènes du système respiratoire.
Quand il y a une infection virale par exemple, le virus se propage par des gouttelettes dans l'air. Il est diffusé par la toux et les éternuements et pénètre dans l'organisme par la bouche, les yeux ou le nez.
Après avoir pénétré dans l'organisme, le virus se déplace de l'arrière de la gorge vers les poumons en passant par les bronches, provoquant une inflammation de leurs muqueuses et endommageant les sacs alvéolaires.
Les macrophages patrouillent et repèrent le pathogène, l'englobent et le phagocytent (le détruisent). La vitamine D va perturber le fonctionnement du virus et permet au macrophage de l'englober.
Vitamine D et Coronavirus-2019?
Le coronavirus a touché des millions d'individus. La distanciation sociale, l'hygiène personnelle et la désinfection régulière des mains ainsi que la limitation des activités collectives n'ont pas été vaines. Cependant, la vitamine D a-t-elle un rôle dans la prévention de la Covid-19 ou l'atténuation de ses symptômes?
Une étude publiée par JAMA Network Open a montré que 77% des patients testés positifs au coronavirus avaient une déficience en vitamine D l'année qui a précédé la pandémie. Une autre étude en Italie a attesté que 80% des patients hospitalisés pour la Covid-19 avec insuffisance respiratoire aigüe en étaient déficients.
Une autre étude en Espagne a montré que la supplémentation atténuait les symptômes et diminuait la sévérité de la maladie mais l'étude du National Institut for Health and Care Excellence n'a pas trouvé de corrélation entre le taux sanguin de vitamine D et la mortalité par la Covid –19.
Une étude prospective allemande de 9940 personnes âgées de 50-75 ans suivies sur 15 ans a montré que le groupe de personnes ayant un taux sanguin de vitamine D supérieur à 20 ng/ml avait une meilleure survie en termes de mortalité respiratoire que ceux qui avaient un taux inférieur à 12 ng/ml, sauf que ce qui a été observé est considéré comme une association et non une causalité.
Une autre grande méta-analyse (plusieurs grandes études analysées ensembles) souvent citée et publiée dans le ''British Medical Journal" a trouvé que la supplémentation en vitamine D à des doses quotidiennes ou hebdomadaires avait un impact sur la prévention des infections respiratoires aigües.
Selon le Dr JoAnn Manson du Brigham and Women's Hospital, les populations ayant un taux bas, tendent à avoir un risque élevé de contracter le coronavirus et à présenter une forme sévère de la maladie.
Une grande étude épidémiologique sur la COVID-19 a relevé une certaine similitude entre les facteurs associés à cette pathologie et ceux liés au déficit en vitamine D à savoir que:
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Les sujets âgés avaient plus de susceptibilité à décéder du coronavirus que les sujets jeunes.
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Les personnes obèses avaient un plus grand risque à contracter la maladie.
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Les personnes de race noire étaient plus vulnérables à la Covid –19 que les personnes de race blanche.
Encore une fois ceci est un constat et non une conclusion de cause à effet.
Une autre étude portant sur 20 pays européens intitulée ''The role of vitamine D in the prevention of coronavirus disease 2019 infection and mortality" a été publiée en mai 2020. Cette étude a pris en compte le niveau sanguin de vitamine D, le nombre de cas infectés par la Covid-19 et le taux de mortalité. Il a été constaté que plus les taux sanguins étaient élevés plus bas était le nombre de cas infectés par million d'habitants et de décès par la Covid-19.
Les autres maladies associées au métabolisme de la vitamine D
Si les études à propos de la vitamine D sont nombreuses, les preuves scientifiques irréfutables manquent.
Comme l’histoire de l’œuf et la poule, il n'est pas encore établi si c'est la maladie qui entraine une insuffisance de cette hormone ou si au contraire c'est son manque qui est la cause de la maladie.
La raison est que les études se font encore entre des groupes à fort et à faible taux de vitamine D. Elles n'ont pas pris en compte les facteurs propres à chaque individu, comme la fréquence de sa pratique d'une activité physique en plein air, son exposition au soleil et celle de son lieu d’habitation.
Faut-il se supplémenter en vit D et à quelles doses?
Le nombre de personnes déficientes en vitamine D à travers le monde serait autour du milliard.
En Allemagne, 80% de la population d'Hambourg présente un taux inférieur aux normes. Au sud de la France il est de 40%-50%.
Dans la population américaine, la carence en vitamine D est de 42% (82,1% dans la population noire et 69,2% dans la population hispanique), avec un taux sanguin optimal ayant été fixé à 33ng/ml (82,4nmol/L) et un taux minimum (seuil de déficience) fixé à 12ng/ml (30nmol/L).
La vitamine D étant une molécule liposoluble, elle va être retenue dans les cellules adipeuses plutôt que de se retrouver dans la circulation sanguine. Les études ont relevé un déficit de moitié chez les personnes obèses en comparaison aux taux moyens de la population normale.
Pour les habitants des régions où la latitude est en dessous de 45 degrés Nord, le déficit est quasi présent notamment en hivers. Il est plus prononcé chez les sujets dont la peau est noire ou très pigmentée car leur production de la vitamine D se fait à un rythme très long.
Il est évident que la supplémentation soit de mise et qu'elle doit être adaptée à l'âge, la situation géographique, la saison et les conditions sanitaires du moment.
Jusqu’à 18 mois, les enfants reçoivent systématiquement une supplémentation à titre préventif contre le rachitisme.
Les personnes âgées, en maison de retraite et peu mobiles, les personnes voilées, celles qui souffrent d'ostéoporose, d'ostéomalacie ou d'allergie au soleil nécessitent une supplémentation régulière.
Selon une étude américaine consommer 1000 UI/J (25mcg) permettrait à 50% de la population d'atteindre un taux de cholécalciférol de 33ng/ml, la prise de 2000 UI/J ramènerait la totalité de la population à ce taux sanguin circulant.
Une dose comprise entre 1000-4000 UI/J peut être prise en supplémentation mais au-delà de 4000 UI/J la prescription doit être faite par son médecin.
Selon la littérature scientifique, la vitamine D n'est toxique que si les doses sont supérieures à 10.000 UI/j, prises sur plusieurs mois.
Les conséquences d'un surdosage se manifestent par des nausées, des malaises, des maux d'estomac. Un niveau sanguin supérieur à 150 ng/ml est associé avec une hypercalcémie, l'issue d'une intoxication grave pourrait être l'insuffisance rénale.
Conclusion
Si les études à propos de la vitamine D sont nombreuses, les preuves scientifiques irréfutables manquent.
Comme l’histoire de l’œuf et la poule, il n'est pas encore établi si c'est la maladie qui entraine une insuffisance de cette hormone ou si au contraire c'est son manque qui est la cause de la maladie.
La raison est que les études se font encore entre des groupes à fort et à faible taux de vitamine D. Elles n'ont pas pris en compte les facteurs propres à chaque individu, comme la fréquence de sa pratique d'une activité physique en plein air, son exposition au soleil et celle de son lieu d’habitation.
Références
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https://www.ncbi.nlm.nih.gov; Is vitamin D deficiency a major global public
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http://www.nhs.uk/conditions/vitamins-and-minerals/vitamin-d White, JH. Vitamin D metabolism and signaling in the immune system. Rev Endocr Metab Disord 2012, 13; 21-29. pmid:21845364
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Jacobo Wortsman (…); Decreased biovailability of vitamine D in obesity, the American Journal of Clinical Nutrition, Volume 72, Issue 3, September 2000, Pages 690-693, https://doi.org/10.1.1o93/ajcn/72.3.690
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Article du journal nutrients: Vitamin D Insufficiency and Deficiency and Mortality from Respiratory Disease in a Cohort of Older Adults: Potential for Limiting the Death Toll during and beyond the COVID-19 Pandemic? Hermann Brenner; Bernard Holleczek and Ben Schottker: Division of Clinical Epidemiology and Aging Research, Germany Cancer Research Center
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6(2020) COVID associated with Age, Race and BMI (similar to Vit D); Factor associated with COVID-19-related death using OpenSAFELY, Elizabeth J. Williamson, Alex J. Walker, (…) Ben Goldacre; Nature 584, 430-43
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Short communication/ Published: 06 May 2020, The role of vitamin D in the prevention of coronavirus disease 2019 infection and mortality; Peter Cristian llie, Simina Stefanescu et Lee Smith: Aging Clinical and Experimental Research 32, 1195-1198(2020)
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Pr Roger Seheult, MD, UC Riverside School of Medecine; Vitamin D and COVID 19. The Evidence for Prevention and Treatment of Coronavirus (SARS CoV 2)
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PubMed abstract; Hansen CM, Binderup L, Hamberg KJ, Carlberg C. Vitamin D and Cancer: effects of 1,25(OH)2D3 and its analogs on growth control and tumorigenesis.
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Medecine: April 2019, a meta-analysis of international studies. Efficacy of vitamin D supplementation on glycemic control in type 2 diabetes patients.